V ous rêvez d'un petit jardin productif, mais vous habitez en ville ? Voici un petit jardin de charme aménagé pour une production abondante, dans le centre de Biarritz.
Le jardin se situe avenue de Verdun en plein coeur de la petite ville de Biarritz, la célèbre ville côtière du sud-ouest de la France qui compte une population d’environ 25 000 habitants, qui triple pendant la saison estivale ! La densité de population y est très élevée 2 098 hab./km2. Avec sa façade maritime de 4 km de long, elle reçoit les intempéries de l’océan Atlantique de plein fouet dans le contexte d’un climat tempéré doux, Cfb dans la classification de Köppen. La température minimale moyenne est de 4,8°C en janvier et la température maximale moyenne est de 24,7°C en août. Les précipitations sont d’environ 1500 mm sur l’année. Les vents dominants sont des vents d’ouest. Le jardin donne sur la rue et sa superficie est d’environ 56 m2. Il est exposé au sud et protégé à l’est par le mur mitoyen et à l’ouest par le mur ouest du jardin adjacent. Le propriétaire est un papa de 36 ans qui vit ici avec sa fille de 3 ans. Il a une sensibilité pour le jardinage et pour l’écologie et aime partager cette fibre avec sa fille. Son objectif était de pouvoir profiter de ce jardin urbain en le rendant productif et propice à la transmission de la joie de cultiver sa propre nourriture avec sa fille, dans le respect de nature. Son idée est aussi de démontrer aux gens du quartier que l’on peut faire d’un petit jardin urbain un lieu de vie et d’abondance. Il avait à l’esprit de partager sa production avec ses amis et ses voisins.
Après discussion avec le propriétaire, il nous a fait confiance et nous a "laissé carte blanche" pour concevoir le jardin...ce qui a été une très bonne nouvelle puisque cela signifiait l'opportunité de ne faire aucune concession et de concevoir un veritable jardin urbain productif avec une Permaculture véritablement authentique.
La toiture de la maison représente une surface de captation de 100 m2. Deux descentes de gouttières se trouve dans le jardin, l’une à l’ouest et l’autre à l’est. Nous avons d’abord inséré un récupérateur d’eau sur la descente ouest d’environ 1000 litres. La descente de gouttière à l’est a aussi été interceptée pour remplir une petite mare devant la fenêtre est (près de la porte d’entrée de la maison) d’une capacité de stockage d’environ 500 litres.
Nous avons ensuite dessiné sur deux lignes de niveau du jardin, un système de stockage de l’eau de pluie souterrains sous la forme de “drains français” horizontaux. Le jardin est légèrement en pente vers le sud. La plus longue ligne de niveau part du point le plus bas de la frontière supérieure, et c’est sur cette ligne de niveau que nous avons placé le premier drain, alimenté par le trop plein de la mare. Le trop plein de ce drain supérieur à été conçu avec un swivel pipe pour contrôle son niveau d’eau et pour déverser dans un second drain, plus aval, sur une ligne de niveau plus courte. Le niveau d’eau et le trop plein de ce drain inférieur est aussi contrôlé par un swivel pipe et se déverse dans le réseau d’eau de la ville, qui, il faut le noter, est un réseau unitaire : soit qu’il collecte à la fois les eaux pluviales et les eaux usées de la ville, qui sont ensuite traitées par la même station d’épuration.
Les drains mesurent environ 50 cm de large sur 50 cm de profondeur, avec une longueur cumulée de 25 m. Ces drains, remplis de graviers, représente une capacité de stockage d’eau d’environ 5 m3, qui s’infiltrera dans les planches de cultures adjacentes.
Le plan d’accès a été conçu autour de l’allée principale qui conduit du portail donnant sur la rue à la porte d’entrée de la maison. Cet accès principal a été conçu avec une bonne largeur d’1m10 pour permettre à la voisine d’un certain âge de circuler facilement, avec un sol antidérapant. Les allées secondaires ont été conçues de manière à ce que les plates-bandes de cultures soient accessibles en tout point en considérant que la portée d’un homme est de 60cm. Les massifs ne sont donc jamais plus larges que 120cm, pour rester accessibles par un côté ou l’autre. Les accès secondaires ont aussi été conçus de manière à augmenter la longueur de bordure pour optimiser “les effets de bordures” qui sont les interfaces produisant le plus d’énergie dans un système.
Aucune structure particulière n’a été construite dans le jardin, mis à part le récupérateur d’eau qui a été placé près de la gouttière ouest, par commodité et pour respecter l’esthétique de la maison.
La pente du jardin est très légère du nord vers le sud, et a permis de laisser circuler l’eau de la façade vers la rue et d’installer les drains de stockage. L’analyse en zone n’a pas vraiment lieu ici étant donné la taille du jardin qui est intégralement une zone 1. Le jardin est très bien protégé des vents dominants d’ouest, l’analyse en secteur pour le vent n’est pas donc pas importante. Le jardin fait face au sud et un grand immeuble qui mesure plus de 20 mètres de haut se trouve au sud de l’autre côté de la rue, légèrement à l’est.
Pour la couche végétale, nous avons visé une centaine de variétés, presque toute productive, et en tous cas, toute utiles au jardin. Nous avons fait certains choix vu la taille du jardin et sa situation urbaine. Par exemple, nous n'avons qu'un seul arbre de canopée, pour éviter l'envahissement spatial. De plus notre client nous demande de produire beaucoup de fruits et légumes, et particulièrement des légumes annuels. Nous avons donc eu besoin de conserver l'entrée de lumière. Nous avons alors choisi des arbres fruitiers ( sous canopée ) à croissance lente, plutôt à petit développement spatial et qui se taillent facilement, ce qui permet de laisser passer la lumière et de permettre la croissance des légumes annuels sous les arbres. Nous avons par contre planter plusieurs fruitiers grimpants parce qu'il peuvent trouver la lumière sans pour autant occuper beaucoup d'espace, comme les mûriers, la vigne, et des kiwis que nous implanterons le long des arbres l'année prochaine. Les petits fruitiers viennent compléter la couche forestière arbustives. Les Goji, framboisier, myrtille sont implantés pour la récolte des fruits, le théier pour la récolte des feuilles et le buddleia, dit "arbre aux papillons" joue le rôle d'attracteur d'insectes.
Un soin particulier à été apporté aux associations favorables de plantes. Par exemple, les choux et les roquettes ont été plantés dans les menthes, parce que la menthe repousse la piéride du choux. Les poireaux ont été associés aux carottes. Le basilic a été planté au pied des tomates. La bourrache près des fraises. En semant les carottes, des radis ont été semés en même temps : les radis poussent vite, puis sont récoltés, restent les carottes en place qui sont alors correctement distancées.
Nous avons utilisé des plantes fleuries et des plantes officinales de manière à ce qu'il y ait une floraison répartie dans le temps, de manière à attirer les pollinisateurs sur une plus longue période. Cela permet d’équilibrer le système en terme de diversité et de limiter le parasitage. Les fonctions d'influence sur le sol des plantes ont été aussi considérées pour constituer la couche végétale. Par exemple, la fameuse consoude décompacte et puise les minéraux en profondeur. Comme les légumes racines dont la récolte aére le sol.
Une des spécificités du travail est qu'un certain équilibre esthétique a été respecté, puisque nous sommes dans une zone très urbaine et que le client souhaitait que son jardin soit joli. Par exemple, les magnifiques artichauts ont beaucoup attiré l’œil des passants ! Nous avons installés quelques fixateurs d'azote, comme la fève par exemple, et d'autres sont prévus dans les successions culturale, comme du lupin et de la moutarde. L'oseille est un accumulateur dynamique de nutriments et un décompacteur du sol. Au fils des saisons, les successions culturales diversifiées permettront d'apporter tous les éléments nécessaires à l'entretien de la fertilité et au maintien de l'équilibre du jardin. Ci-dessous, voici comment les différentes couches de la forêt sont représentées dans le jardin.
Nous avons installé dans ce jardin toutes les couches de la forêt pour illustrer le principe d'écosystème et pour assurer sa stabilité. Voici la composition des différentes couches.
Les arbres de canopée :
Pour représenter cette couche, nous avons choisi d'implanter un palmier à chanvre, ainsi que pour des raisons esthétique. Ses feuilles constituent un paillage riche en silice.
Les arbres de sous-canopée :
bambou Fargescia, Figuier, Poirier, Pommier, Abricotier, canne de Provence, Pêcher de vigne
Les arbustes :
Ciste, Théier, lin de Nouvelle-Zélande, Verveine citronnelle, Arbres aux papillons, Goji, Romarin, Rosier buisson, Sauge officinale, Santoline, Framboisier, Myrtille, Sauge ananas, Romarin rostrata, Mauve officinale, Ricin, Amour en cage
La couche herbacée:
Ciboulette, Persil, verveine de Buenos-Aires, Iris des jardins, Souci, Menthe poivrée, Choux à couper, Oseille, Choux kale Darkibor, Menthe thaï, Cosmos, Bourrache, Mâche, Feve, Roquette, Consoude, Coriandre, Choux chinois Pe-Tsaï, Courgettes, Blettes, Artichauts, Thym officinal, Géranium vivace, Cheveux d'anges stipa tenuifolia, Rose trémière, marguerites, Thym citron, pervenches, Carex, Thym citron panaché, Valériane, Origan, Camomille, Rubarbe, Brocoli, Estragon, Maïs, Fenouil, Asperges, Poireau d'été, Tomates cerises, Tomates, Citronnelle, Œillets d’inde, Feuille de chêne, Laitue, Aubergines, Poivron, Haricots, Tournesol, Potimarron, Absinthe, Hémérocalle, Rue officinale, Basilic, Coréopsis
La couche des couvres-sol:
Saponaire de Montpellier, Vergerette de Karvinski, Pourpier vivace, Sedum, Thym serpolet, Fraises, Menthe douce, liseron de Mauritanie, Capucines
La couche des racines :
Betteraves, Oignons, Radis, Carottes, Patates douces
La couche des grimpants :
Vigne, Murier grimpant des jardins, Petits pois, Ipomée vivace, Jasmin offficinale, Rosier grimpant, Clématite des montagnes, Chèvrefeuille du japon, Concombre, haricot à rame
Les plantes aquatiques :
Iris (d'eau) des marais, Papyrus, Prêle, nénuphar, Lentilles d'eau, Fougère d'eau, Queue de cheval, Acorus
Les champignons :
Plusieurs espèces de champignons ont poussé spontanément dans le jardin.
Voici quelques principes de la Permaculture illustrés dans ce jardin.
Voici quelques photos décrivant le processus d'installation du design, que l'on appelle phase d'implémentation dans le jargon.
Ce jardin est un véritable lieu de démonstration pour les gens qui passent dans cette rue très fréquentée. Il démontre la faisabilité de créer des écosystèmes stables et naturels en plein cœur des villes pour ramener la production près des gens, pour leur offrir des fruits et légumes à très forte densité nutritionnelle. Le bureau d'études Terre Permaculture a voulu démontré le concept de positivité carbone avec ce jardin qui est un vrai piège à carbone et contribue à la régulation climatique.
Ce jardin, grâce à ses drains de stockage de l'eau de pluie dans le sol, constitue un "jardin de pluie" qui limite les fortes pluie dans le réseau de traitement de la ville et contribue donc à diminuer la pollution de l'océan. En envisageant cette solution à plusieurs endroits stratégiquement choisis dans la ville, la pollution des eaux de baignades pourrait être grandement contrôlée.